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Inventer de nouveaux parcours professionnels : le cursus Humanités et Management

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Pour rompre le cloisonnement traditionnel des parcours de formation, et permettre d’accompagner l’insertion professionnelle des étudiants de haut niveau en Lettres et Sciences humaines et Sociales, l’ENS et l’Université Paris-Dauphine ont lancé en octobre un nouveau cursus bac+6 Humanités et Management.

Etudiants de l'Ecole normale supérieure devant une équation mathématique.

Antoine Blanc, maître de conférences à l'Université Paris-Dauphine, et responsable de la formation, revient sur les grands enjeux de ce post-master innovant et atypique.

 

PSL : Humanités et management ont été, et sont encore, très fréquemment présentées comme deux domaines d’études aux antipodes… Comment est née l’idée d’une formation bac+6 les réunissant ? Et quelles en sont les principales attentes ?

A.B : Comme souvent le projet est né d’une discussion. En 2015, Marc Mézard, directeur de l’ENS et Laurent Batsch, alors président de l’Université Paris-Dauphine, constatent qu’ils n’existent pas de dispositif de formation réellement satisfaisant afin d’accompagner les étudiants à haut potentiel en Lettres et Sciences humaines et sociales (SHS) vers les entreprises. Pourtant, non seulement, les profils d’étudiants et leurs aspirations professionnelles se sont diversifiés, mais il existe à PSL l’ensemble des ressources nécessaires pour imaginer et mettre en œuvre cette formation. Le projet est lancé et le cursus bac+6 Humanités et Management a accueilli en octobre 2017 sa première promotion. Tous ont des parcours exceptionnels en Lettres, Musique, Histoire de l’art, Philosophie… Nous allons les accompagner pendant un an (4 mois de cours et 6 mois de stage) pour construire leur trajectoire professionnelle.

 

PSL : Quelles sont, selon vous, les principales compétences que les étudiants en Lettres et Sciences humaines et sociales peuvent apporter dans les entreprises ?

S’il est difficile de prévoir exactement ce qu’une personne issue d’une formation en SHS va apporter à une entreprise, il est certain qu’elle apportera un regard différent.

A.B : Au-delà, d’une tête bien faite et d’une grande culture, les étudiants issus des formations en « humanités » disposent, de manière générale, de bonnes capacités de synthèse et de compréhension des systèmes complexes. Ils savent aussi manier curiosité et profondeur d’analyse. Il s’agit aussi, généralement, d’étudiants sensibles au monde et capables de se passionner pour leurs sujets d’études. Un « savoir-être » qui est de plus en plus valorisé à l’heure actuelle dans les recrutements. Pour les entreprises, c’est un profil intéressant car ils sont capables de sortir du cadre de pensée classique pour innover. Or, la dimension expérimentale est désormais impérative pour les entreprises dans le paysage concurrentiel international actuel. Aussi, s’il est difficile de prévoir exactement ce qu’une personne issue d’une formation en SHS va apporter à une entreprise, il est certain qu’elle apportera un regard différent. Qu’il s’agisse d’une prise de recul sur des sujets stratégiques, ou d’une plus grande réflexivité, ces profils sont indéniablement, pour les entreprises, une des clés des innovations futures.
Aujourd’hui, cependant, la méconnaissance entre les deux univers est telle, qu’autant les entreprises que les étudiants hésitent à sauter le pas. Il est important aujourd’hui de réduire la marge de risque, et c’est l’une des missions de la formation Humanités et Management.

 

PSL : Quels sont les principaux avantages de cette formation Bac+ 6 pour les futurs étudiants et les employeurs par rapport à d’autres formations complémentaires (MBA, IAE) ?

A.B : L’originalité vient tout d’abord du positionnement du cursus, qui est conçu et pensé spécifiquement pour des étudiants de haut niveau en Lettres et Sciences humaines et Sociales. En d’autres termes, il ne s’agit pas de transformer, en l’espace d’un an, un jeune docteur en Histoire en un étudiant en Gestion issu d’une école de commerce ou d’un IAE, mais au contraire, de tenir compte de la spécificité de ces profils.
Concrètement, la formation prévoit une articulation entre des enseignements pratiques destinés à renforcer la connaissance concrète du monde de l’entreprise et des enseignements plus théoriques permettant de développer une réflexion personnelle sur les nouvelles matières enseignées. Une majorité d’enseignants de la formation sont adossés à des centres de recherche réputés pour leur approche transdisciplinaire de la gestion (Histoire, Sociologie, Art, …).  Par exemple le cours de comptabilité animé par Pierre Labardin se fait à la fois sous un angle instrumental – comment lire un bilan, un compte de résultat ? – et sous l’angle théorique de l’Histoire de la comptabilité. L’approche pédagogique est principalement « à l’américaine », c’est-à-dire fondée sur des lectures personnelles, des business cases, des projets en groupe et de nombreuses interactions avec l’enseignant. Cela permet de faciliter une acculturation rapide aux problématiques des entreprises tout en développant une réflexion personnelle dense.