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Promouvoir une recherche thérapeutique d'excellence : le programme doctoral PSL - Biogen

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En 2018, PSL et Biogen ont signé un accord de collaboration pour promouvoir la recherche thérapeutique dans le domaine des maladies neurodégénératives et neurologiques. A ce jour, huit doctorantes et doctorants ont été sélectionnés dans le cadre du programme d’échange et ont exposé leurs premiers résultats à l’occasion du premier symposium annuel du programme doctoral PSL-Biogen. Interview d’Antoine Triller (fondateur de l'Institut de Biologie de l'ENS - PSL) et Chris Henderson (VP, Neuromuscular and Movement Disorders Research Unit chez Biogen), co-coordinateurs scientifiques du programme.

Antoin,e Triller (ENS - PSL) & Chris Henderson (Biogen)

PSL : Le programme PSL – Biogen a été lancé en 2018. Pourriez-vous rappeler brièvement les principaux objectifs de cette collaboration ?

Antoine Triller : Le programme PSL – Biogen est assez unique. En premier lieu, il est, sans doute, le premier programme d’échange à permettre une relation institutionnelle entre une entreprise telle que Biogen et une université tout en se distinguant des autres dispositifs de thèses financées déjà connus (CIFRE ou autre…). Il propose ainsi aux doctorants sélectionnés un dispositif original de « double mentoring » par des chercheurs de PSL et des scientifiques de Biogen, leur permettant de s’initier à une double culture. Les doctorants PSL disons « classiques » côtoient au sein du programme des chercheurs ou ingénieurs « Biogen » ayant fait le choix d'étendre leurs activités professionnelles au sein d’une thèse. Cette interpénétration des cultures est inspirante et pourrait être étendue à d’autres formations et pourquoi pas dès le Master.
Chris Henderson : Cette convergence entre PSL et Biogen est en effet tout à fait intéressante et, pour l’expliciter, peut-être faudrait-il commencer par ce que ce partenariat n’est pas ! Il ne s’agit pas, pour reprendre une confusion courante, d’un financement de Biogen pour des travaux scientifiques que nous aimerions voir réaliser. Nous disposons pour cela d’autres moyens beaucoup plus directs. Au contraire, tout l’intérêt de ce programme doctoral est de permettre et encourager la rencontre entre deux mondes qui ont parfois trop tendance à se regarder « en chiens de faïence » (pour reprendre une expression française). Notre espoir est ainsi que ces interactions scientifiques permettent l’émergence d’une cohorte de chercheurs qui ne craindront pas les partenariats et sauront au contraire en tirer profit. Par ailleurs, si ce programme permet de produire une belle science et de belles découvertes pour les malades, nous serons comblés, bien entendu.

PSL : Ce partenariat est le premier accord signé par Biogen avec une université française. Pourquoi avoir choisi l’Université PSL ?

C. Henderson : Il s’agit même du premier contrat signé par Biogen avec une université européenne. Notre choix a, avant toute chose, été guidé par l’excellence des laboratoires et des formations de l’université. Une excellence avec laquelle nous étions familiers, car plusieurs d’entre nous à Biogen ont fréquenté ou travaillé au préalable avec des chercheurs de PSL. Nous étions également très intéressés par la dimension pluridisciplinaire de PSL et les présentations faites à l’occasion de ce premier symposium ne font que nous renforcer dans notre décision. Les étudiantes et étudiants semblent profiter pleinement des interactions possibles avec les laboratoires d’ingénierie, de chimie… Les premiers retours sont très positifs et encourageants pour la suite.
A. Triller : Il faut également souligner l’accueil positif et bienveillant des universités parisiennes partenaires de PSL, dont les écoles doctorales accueillent la majorité des doctorants du programme et qui ont accepté ce partenariat. Ainsi, l’accord avec l’Université PSL a également permis à Biogen de travailler avec ces universités partenaires.

L'ensemble des membres du programme doctoral PSL-Biogen lors du symposium du 7 et 8 octobre 2019 © Universite PSL

PSL : Quels sont les profils et les sujets de recherche des huit doctorantes et doctorants sélectionnés du programme ?

A.Triller : Les sujets couvrent des domaines assez variés allant de la neuroscience à l’imagerie en passant par la biologie quantitative et la chimie. Ils ont en commun de s’attacher à éclairer d’un jour nouveau les mécanismes propres aux maladies neurodégénératives telles qu’Alzheimer, Parkinson, scléroses en plaques etc. Quant aux profils des doctorants, ils sont très liés au parti-pris du programme qui entend réunir des étudiants ayant suivi des cursus académiques standards et d’autres aux parcours plus hétérodoxes. Loin d’être banal, il s’agit là pour moi d’un point essentiel. Le programme PSL-Biogen prouve, s’il le fallait, que les formations mixtes intéressent aussi bien des chercheurs issus de laboratoires fondamentaux que des profils scientifiques travaillant au contact des patients dans un hôpital. D’ailleurs, toute la force et l’intelligence de Biogen sont d’avoir compris qu’il s’agissait d’une richesse et d’une ressource potentielle unique.
C. Henderson : On trouve effectivement, parmi les huit thèses du programme, une gamme extrêmement large de sujets. Certains s’attachent à explorer des pans de recherche fondamentale, comme les travaux menés par Anna Nawrocka, sous la direction d’Alena Shkumatava (Institut Curie) et Jessica Hurt (Biogen) sur les ARN de poisson zèbre dans le cadre de sa thèse « Regulation of neural stem cells and neurogeneration by long noncoding RNAS ». On pourrait également citer au même titre, les travaux de Clémentine Hatton sous la direction de Stephane Dieudonné, Vincent Villette (Institut de Biologie de l’Ecole normale supérieure – PSL) et Yael Mandelbat-Cerf (Biogen) sur l’électrophysiologie des cellules de Purkinje dans le cadre de la thèse « Dentritic calcium signaling and activity of cerebellar Purkinje cells in vivo ». Bien que fondamentales, ces recherches contribueront à deux sujets très importants pour la drug discovery de l'avenir, à savoir une meilleure connaissance des ARN non-codants et la signalisation par le calcium.
A. Triller : Pour compléter, il me semble important de citer, parmi les sujets de recherches appliquées, les travaux de Benoît Beliard (doctorant ESPCI Paris, établissement composante de l'Université PSL) ou de John Joyce (ingénieur de recherche Biogen) qui sont l’un et l’autre très prometteurs dans leurs domaines. Benoit Béliard travaille sur un programme d’imagerie ultrason haute définition, encadré par Sophie Pezet (ESPCI Paris) et Daniel Bradley (Biogen) entre autres. Cette recherche a rencontré un large écho dans la communauté scientifique. Son sujet de thèse exact est « Use of functional ultrasound imaging in a pre-clinical animal model of multiple sclerosis : new insight in the alterations in the brain ». John Joyce travaille lui sous la direction de Morwena Latouche et Giovanni Stevanin à l’EPHE – PSL, ainsi qu’Anthone Dunah et Will Chen pour Biogen à l’étude intitulée « Progranulin deficiency in frontotemporal dementia induces a significant burden upon inhibitory interneurons ».  

PSL : Quels sont selon vous les grands défis en neuroscience des années à venir ?

C. Henderson : Le défi numéro un est certainement, selon moi, une meilleure compréhension du système nerveux humain. A l’heure actuelle, en dépit de la belle science réalisée au stade expérimental, nous restons dans l’incertitude concernant ses effets sur l’Homme. Les maladies ont des causes multiples et complexes, pour imaginer des traitements, il est absolument nécessaire de comprendre la complexité des phénotypes.
A. Triller : Du point de vue des sciences fondamentales, le défi réside selon moi dans le saut d’échelle, soit le passage d’un mécanisme très fondamental moléculaire à un phénomène plus intégré au niveau cellulaire, puis intégré à son tour au niveau des réseaux des neurones et ainsi de suite… Ces sauts d’échelle sont complexifiés par la nécessité de prendre en compte les régulations inhérentes à chaque niveau qui eux même régule les autres niveaux. L’ensemble forme in fine un système qui, hors équilibre et non-stationnaire, est très difficile à modéliser. En appliquant cette problématique à une mutation causant, pour prendre un exemple connu, la maladie d'Alzheimer, cela revient à se poser de manière ultime la question du niveau et du timing de l’intervention thérapeutique.

PSL : L’AAP 2020 du programme sera lancé très prochainement. Pourriez-vous en dire quelques mots ?

A.Triller : Comme pour les précédents appels les sujets thèses proposées devront s’inscrire dans le champ large des neurosciences, en incluant l’approche « deep learning » et « data sciences », et pouvant avoir des retombées dans les domaines des maladies neurodégénératives, démyélinisantes et génétiques. Toutes les approches, moléculaires, cellulaires, in vivo/in vitro, chez l’animal ou chez l’homme, sont concernées. Les projets peuvent se situer aux interfaces entre les neurosciences, y compris les sciences cognitives, et d’autres domaines comme la physique, la chimie, l’informatique, les mathématiques, les nanotechnologies.

Appels à projets 2019 du programme doctoral PSL-Biogen

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Les thèses sélectionnées dans le cadre du programme doctoral PSL-Biogen

Thèses sélectionnées en 2018

  • Anna Nawrocka « Regulation of neural stem cells and neuroregeneration by long noncoding RNAs». Elle réalise sa thèse au sein de l'Institut Curie sous la direction d'Alena Shkumatava, et de Biogen sous la supervision de Jessica Hurt.
  • Clémentine Hatton : « Dendritic calcium signaling and activity of cerebellar purkinje cells in vivo». Elle réalise sa thèse au sein de l'Institut de Biologie de l'Ecole normale supérieure - PSL sous la direction de Stéphane Dieudonné et Vincent Villette, et de Biogen sous la supervision de Yaël Mandelbat-Cerf.
  • Christine Liu : «The role of post‐translational modifications in α‐synuclein aggregation and toxicity». Elle réalise sa thèse au sein de Biogen sous la supervision de Blake Pepinsky, et de l'Institut de Biologie de l'Ecole normale supérieure - PSL sous la direction d'Antoine Triller et Christian Specht.
  • Karl Richter : « Interactions of RAN dipeptides with the nuclear envelope and nuclear import and export proteins - Interactions des dipeptides RAN avec l'enveloppe nucléaire et les protéines d'importation et d'exportation nucléaires». Il réalise sa thèse au sein de Biogen sous la supervision d'Alexander McCampbell, et de l'Institut Curie sous la direction de Graca Raposo.

Thèses sélectionnées en 2019

  • Marion Leblanc : « Normal and pathological splicing of motor neuro genes as the source of clinical variability”. Elle réalise sa thèse au sein de l’EPHE – PSL sous la direction de Giovanni Stevanin et de Biogen.
  • Benoit Beliard : « Use of functional ultrasound imaging in a pre-clinical animal model of multiple sclerosis: new insight in the alteration in the brain”. Il réalise sa thèse au sein de l’ESPCI Paris sous la direction de Sophie Pezet et de Biogen sous la supervision de Daniel Bradley.
  • Irina Leaf : « A reverse translational approach to identify and evaluate molecular drivers of progression in multiple sclerosis”. Elle réalise sa thèse au sein de Biogen sous la supervision d'Ellen Cahir-McFarland et de l’Institut du Cerveau et de la Moelle épinière (ICM) sous la direction de Catherine Lubetzki et Bernard Zalc.
  • John Joyce : « Progranulin deficiency in frontotemporal dementia induces a significant burden upon inhibitory interneurons ». Il réalise sa thèse au sein de Biogen sous la supervision d’Anthone Dunah et Will Chen, et de l’EPHE – PSL sous la direction de Morwena Latouche et Giovanni Stevanin.